lundi 4 août 2014

Martine Carol Comédienne française.


 


Martine Carol, de son vrai nom Marie-Louise Jeanne Nicolle Mourer, actrice française, née le 16 mai 1920 à Saint-Mandé, Val-de-Marne, décédée le 6 février 1967 à Monte Carlo, Monaco.

Sa rencontre avec les comédiens Micheline Presle, star montante du cinéma français, et André Luguet, ex-jeune premier du cinéma français et américain, sera le premier appel du destin. Sur les conseils d'André Luguet, elle entame une carrière au théâtre, en suivant les cours de Robert Manuel  et de René Simon. Elle débute au Théâtre de la Renaissance dans La Route du tabac, aux côtés de Mouloudji, et dans Phèdre, sous le nom de Maryse Arley. 


Pendant l’Occupation, comme beaucoup d’acteurs français, elle tourne des films financés par la firme allemande Continental, dirigée par Alfred Greven. Remarquée par Henri-Georges Clouzot, elle figure dans Le chat, adapté d'une nouvelle de Colette, film qui ne sera jamais distribué. En 1941, elle figure dans Le dernier des six, aux côtés de Pierre Fresnay et Jean Tissier, puis dans Les inconnus dans la maison, avec Raimu. En 1943, Martine Carol le pseudonyme lui a été trouvé par François Périer. Elle  tourne La ferme aux loups, aux côtés de François Périer et de Pal Meurisse. On la retrouve désormais régulièrerment au cinéma où sa beauté fait merveille, notamment dans Miroir en 1947 avec Jean Gabin, Les amants de Vérone en 1948 avec Pierre Brasseur, ou encore Je n’aime que toi en 1949 avec le chanteur
Luis Mariano.

Son nom sera associé pour longtemps au personnage qui l'a rendu célèbre, Caroline chérie, adapté des romans de Cécile Saint-Laurent. Martine Carol y incarne une aristocrate ravissante et déterminée qui survit à la Révolution et prend sa revanche sous l’Empire, en usant largement de ses talents de séductrice. En 1954, elle épouse le metteur en scène français Christian-Jaque qui lui réserve des rôles à la mesure de sa plastique de rêve et du "sex-symbol" typique des années 50 qu'elle est devenue.




Martine Carol

On la voit alors dans Madame du Barry, Nana, Nathalie. Elle travaille avec Sacha Guitry pour l'un des innombrables petits rôles de Si Versailles m’était conté en 1953, Max Ophüls Lola Montès, 1955, Albert Gance  Austerlitz en 1959, René Clair, Terence Young, Vittorio de Sica, etc. Elle donne la réplique à Gérard Philippe, Ralf Vallone, Charles Boyer, Vittorio Gassman  etc. Le film Lola Montès lui attire enfin la faveur de la critique, qui n'avait jamais été tendre avec elle auparavant, lui reprochant d'être « une mauvaise comédienne ». Boudé par le public, ce film retraçait la vie d'une courtisane déchue et ruinée, qui s'exhibait dans un cirque pour pouvoir survivre. Une interprétation prémonitoire...

Dans les années 60, en effet, sa notoriété commence à être battue en brèche par l'étoile montante, Brigitte Bardot, aussi emblématique des années 60 que Martine l'est des fifties. De même, le cinéma qui a fait sa gloire, fait de grandes fresques à la plastique aussi impeccable qu'artificielle, est assassiné par la Nouvelle vague et son naturalisme nonchalant. Très déprimée, elle se bourre de médicaments et s'impose des cures d'amaigrissement draconiennes. Après une interruption de quatre ans et un nouveau mariage avec un homme d'affaires anglais, elle tourne son dernier film, L’Enfer est vide (1966). Peu de temps après le tournage, elle est retrouvée morte par son mari le 6 février 1967, à 2h30 du matin, dans sa chambre à l'Hôtel le Paris à Monte Carlo. On diagnostiquera une crise cardiaque. Des rumeurs de suicide circulèrent, sans trouver de confirmation. Une fin tragique pour une actrice qui marqua son époque et qui occupe, depuis, une place à part dans l'histoire du cinéma.

Sentimentale à l'excès, elle fut malheureuse en amour. Ainsi, quand le comédien Georges Marchal, son premier amant, lui préféra Dany Robin, elle se jeta dans la Seine, le 10 avril 1947, au pont de l'Alma, après avoir absorbé de l'alcool et des médicaments. C'est un chauffeur de taxi qui la sauva de la noyade.


 Martine Carol

Le mystère de la mort étrange de Martine Carol
Dans la famille des morts suspectes, je voudrais… Martine Carol, extraite du volume 2 de ‘‘Morts étranges’’ de Bernard Pasciuto. Extraits
La théorie des fruits assassins
 

C’était un soir de février 1967. Monte-Carlo, en hiver, sommeille gentiment en attendant le printemps, qui arrive ici toujours avec un peu d’avance. Les voitures somptueuses se font encore rares, tout comme les fêtes éclatantes, les bijoux étincelants portés par des femmes superbes. Les palaces s’ennuient, les yachts sont assoupis dans le port, la vie va au ralenti. Celles et ceux qui choisissent de venir à Monaco en cette période, pour quelques jours ou quelques semaines, ne sont pas là pour s’amuser mais pour se reposer.

Martine et son nouveau mari, Mike Eland, sont arrivés dans la principauté quelques jours plus tôt. Ils sont invités à un grand gala qui se déroulera le lendemain soir. Le couple occupe la suite 8555 du célèbre Hôtel de Paris. Lors de la première partie de la soirée, il dîne avec des amis, tout se passe bien. Après le repas, Martine, qui avait prévu d’assister à la représentation d’un film en avant-première, renonce au dernier moment. Elle se sent fatiguée et préfère rentrer à l’hôtel. Mike lui propose de la raccompagner, mais elle insiste pour qu’il poursuive la soirée avec leurs amis.

De retour dans sa suite, Martine cherche le sommeil. En vain. C’est ce qu’elle explique à son mari quand il lui téléphone une heure plus tard. Il lui conseille de ne pas prendre un somnifère ou un calmant. Puisqu’elle se sent fatiguée, elle peut essayer de dormir sans l’aide de ses médicaments habituels.

Néanmoins, il donne des consignes au concierge de l’hôtel : si besoin est, ce dernier fera appel à un médecin qui viendra immédiatement. Mike prévient sa femme, qui se sent rassurée, puis il rejoint ses amis. Vers 23 heures, à la demande de Martine Carol, le concierge appelle un médecin, qui vient faire une piqûre à l’actrice.
Mike Eland est de retour vers 2h30 du matin et découvre sa femme inanimée dans la salle de bains.

A nouveau un médecin est appelé. Très vite, il constate qu’il ne peut pas faire grand-chose. Il faut la transporter d’urgence à l’hôpital dans l’espoir que l’on puisse encore la sauver. Une ambulance surgit et emporte Martine en mugissant dans la nuit monégasque. En vain. Il est impossible de la réanimer.

 

Le lendemain, le monde entier – car elle était célèbre dans le monde entier – apprend la mort de Martine Carol, sex-symbol mélodramatique des années 1950, dont les années 1960 auront marqué la longue, lente et inexorable agonie.
 
Les journaux hésitent à titrer en gros caractères sur la crise cardiaque qui vient d’emporter Martine Carol à quarante-sept ans, selon la version officielle. Ils hésitent parce qu’ils ne croient pas à cette crise cardiaque.

Il y a autre chose, c’est certain. Quelques-uns évoquent un probable suicide.
Martine Carol n’en serait pas à son coup d’essai…
Dans les jours suivants, les témoignages se succèdent, apportant leur lot de contradictions. Pour les uns, Martine, devenue une étoile sans lumière, est arrivée au bout du chemin.
Et elle a choisi d’en terminer brusquement, sans faire d’histoires.

Pour d’autres, elle va de mieux en mieux, s’apprête à entreprendre une deuxième carrière. Mieux, elle est enfin heureuse en amour, avec Mike Eland, son quatrième mari. Une impitoyable crise cardiaque est venue tout gâcher.
Une troisième vérité va naître de l’autopsie.
L’actrice serait morte en s’étouffant. Ce soir-là, n’ayant pratiquement pas mangé au restaurant, elle s’est fait porter plusieurs fruits dans sa suite. Et en a consommé quelques-uns. A un moment donné, elle aurait été amenée à régurgiter. Hélas, une partie des aliments, coincée dans la trachée artère, aurait provoqué une suffocation puis un étouffement mortel.

Une version assez peu satisfaisante. On voit mal comment le fait d’avaler quelques fruits peut avoir provoqué un étouffement par étranglement. D’autant que les défenseurs de cette thèse ajoutent que c’est ensuite que s’est produite la crise cardiaque.

S’il ne se dessine pas de lueur de vérité au fur et à mesure des hypothèses, il apparaît de plus en plus évident qu’il y a quelque chose de trouble dans cette mort. On a trop vite diagnostiqué une crise cardiaque. Comme pour faire taire toutes les questions qui pourraient se profiler. Ensuite, toujours venue de l’hôpital, est arrivée la thèse des ‘‘fruits meurtriers’’ qui auraient été à l’origine de la crise cardiaque…

A mots feutrés, on évoque plutôt l’état général de Martine Carol, ses abus de drogues diverses, et l’on murmure ce qui ne peut apparemment pas être dit à haute voix : surdose et suicide sont les mots qui reviennent fréquemment.
Et si Martine Carol avait mis fin à ses jours, par abus ou par volonté, et que l’on ait voulu le cacher à son public… ?
Il est vrai qu’il y a dans cette existence accidentée, remplie de passions jamais abouties, tous les ingrédients d’une fin tragique. Certaines vies qui finissent mal avaient tout aussi mal commencé. Ce n’est pas le cas ici. Dans l’enfance de Martine Carol, on trouve surtout des parents affectueux et un décor on ne peut plus serein. C’est à Saint-Mandé (Val-de-Marne), dans la banlieue est de Paris où elle est née le 6 mai 1920, qu’a grandi celle qui s’appelait encore Marie-Louise Mourer.

Bonne élève, elle termine ses études secondaires à Paris avant de convaincre ses parents :que  sa vocation, c’est d’être comédienne. Elle le sent dans tout son être, comme une passion qui emporte tout.



 



Très sérieusement, parce qu’elle est sérieuse en tout, elle suit les cours d’art dramatique de Robert Manuel, de René Simon, de Jean Wall. Là aussi, elle est bonne élève, accrocheuse, imprégnée du désir d’apprendre, de progresser. Elle est prête à sacrifier beaucoup pour réaliser son rêve. Quand les autres font la fête, sortent tard la nuit avec des garçons, elle a décidé que tout cela passerait au second plan quelques années encore.
Dès 1940, elle monte sur les planches au théâtre de la Renaissance pour jouer aux côtés de Mouloudji dans La Route au tabac, une pièce adaptée du célèbre roman d’Erskine Caldwell. Elle enchaîne avec Phèdre. Pas mal pour une débutante de vingt ans. Elle tourne son premier film, La Chatte, d’après Colette, mais le film ne sera jamais distribué. Qu’importe, l’année suivante elle joue dans deux films qui comptent, Le Dernier des six, avec Pierre Fresnay, et Les Inconnus dans la maison, avec Raimu.
Elle n’a que vingt et un ans et la voilà partenaire de deux monstres sacrés du cinéma français. Les rôles ne sont pas immenses, mais ils promettent un avenir somptueux. 1943 est à marquer d’une pierre noire dans sa vie jusque-là immaculée. C’est l’année d’un grand fracas, d’un cauchemar qui signe la fin de l’innocence, des illusions et, d’une certaine manière, de sa jeunesse.
On ne connaîtra jamais les circonstances exactes qui ont fait que la jeune Marie-Louise Mourer s’est retrouvée un jour en contact avec Pierrot le Fou, le gangster le plus recherché de France, tueur pathétique, qui hantait alors les unes des quotidiens. Pourquoi l’a-t-il enlevée pendant quelques heures avant de la libérer ? Savait-il qui était cette jeune comédienne certes prometteuse, mais encore relativement peu connue? Que s’est-il passé entre eux ?
La vérité officielle dira que Pierrot le Fou a tenté de violer Marie-Louise qui a résisté furieusement. Si furieusement que son agresseur, ne parvenant pas à ses fins, s’est vengé en la frappant.
 

Personne ne voulut en rajouter et mettre en doute cette vérité, mais peu de monde y croyait. Pierre Loutrel n’avait pas été surnommé Pierrot le Fou pour rien, et il n’était pas du genre à se laisser repousser par une toute jeune femme tombée dans ses griffes. Sans jamais l’exprimer, la presse laissa entendre qu’il y avait sans doute eu viol.
Ce qui se passa dans les mois qui suivirent sonna comme une confirmation. Marie-Louise changea du tout au tout. Elle n’était plus emplie d’espérance dans la vie, de gaieté et de foi en son avenir. La jeune fille sérieuse et enjouée se muait peu à peu en une femme refermée sur elle-même, crispée et morose.
D’ailleurs, elle changea de nom comme on change de peau. Il y avait désormais une tache sur son passé et elle voulait oublier. Elle devint Maryse Arley, mais ça ne s’arrangea pas pour autant. Pendant quelque temps, sa jeune carrière va s’en ressentir. Un peu comme si elle n’avait plus la flamme.
 


La vie semble peu à peu reprendre ses droits quand elle change à nouveau de nom pour devenir Martine Carol. Elle tourne avec François Périer puis avec Jean Gabin dans Miroir. Sa carrière est relancée, ou enfin lancée, croit-on. On croit surtout qu’elle a vaincu ses démons, effacé définitivement les traces laissées dans son cœur et dans son esprit par la brutalité de Pierrot le Fou.
On se trompe. La fragilité est toujours là. Elle va s’en rendre compte dès sa première vraie passion amoureuse. Son coup de foudre pour Georges Marchal, jeune acteur séduisant, en étonne beaucoup. Elle-même ne se croyait plus capable d’aimer. Quelques mois de bonheur, des projets qui se bousculent, la vie qui devient à nouveau radieuse, un horizon limpide et puis, brutalement, le choc, aussi brutal que violent. Georges Marchal la quitte pour une autre comédienne, Dany Robin. La dépression qui s’ensuit atteindra son point culminant le 10 avril 1947. Ce jour-là, au désespoir, Martine Carol se jette dans la Seine. Elle en a assez vu, de cette vie qui n’offre que des coups bas. Autant en finir tout de suite. Un chauffeur de taxi qui passait par là et l’a vue sauter plonge à sa rescousse et réussit à la sauver.
Ce suicide manqué mais spectaculaire, en plein Paris, fait la une des journaux, qui s’en donnent à cœur joie. Certains ironisent même sur l’intervention à point nommé du chauffeur de taxi et laissent entendre que tout cela n’est qu’un vaste coup de pub, une opération promotionnelle pour starlette en mal de célébrité. Ecœurée, toujours aux prises avec les affres de la dépression, elle voudrait aller se cacher au bout du monde, ne plus voir personne. Pas si simple.
Elle va y parvenir, songe-t-elle, lorsqu’elle reçoit une étrange proposition : le patron du plus grand cirque du monde, John Ringling North, veut l’engager ! Il l’a connue grâce à sa tentative de suicide, s’est fait envoyer des photos d’elle et a décrété qu’elle était la plus belle femme de l’univers. Il lui offre un contrat faramineux pour simplement paraître en reine de sa parade.
Certes, ce n’est pas une île déserte à l’abri du monde, des regards et des médisances, mais c’est bien mieux que Paris, la France, et tous les ragots qu’elle inspire. Pendant quelques semaines, Martine va sillonner les Etats-Unis à bord de son wagon privé, or et blanc. Devenue reine en exil, elle conquiert le public américain, en tout cas ses couches populaires, celles qui comptent le plus dans la carrière d’une actrice.
Sa longue équipée lui permet aussi de rencon- trer l’amour. Elle n’y croyait plus depuis l’abandon de Georges Marchal. Voilà qu’il se présente sous les traits de Steve Crane, l’ex-mari de Lana Turner. Elle y croit à nouveau et épouse Steve en 1948. Peu de temps après, elle se découvre enceinte, ce qui la rend folle de joie : avoir des enfants, beaucoup si possible, est désormais une priorité pour elle, une exigence absolue.
Elle est enceinte de cinq mois lorsque, en vacances à Cannes avec son mari, elle doit affronter une nouvelle épreuve. Ce jour-là, toute la ville frémit des noces qui célèbrent l’union très hollywoodienne d’Ali Khan avec la star des stars, immortalisée par Gilda, Rita Hayworth. La fête se déroule dans la magnifique villa du prince, en bord de mer.
En plein après-midi, Martine Carol décide de faire du ski nautique à quelques dizaines de mètres de là, face à la villa. Trop près du bord, il y a beaucoup d’agitation, de petites embarcations, des nageurs… L’une ou l’autre finit par gêner la skieuse. Un écart, l’équilibre rompu, la chute, enfin, violente, sur l’eau devenue aussi dure que du béton. Un hurlement de douleur et de frayeur, tout à la fois. Transportée aussitôt à l’hôpital, Martine Carol y est opérée d’urgence. Dans la soirée, elle perd le bébé qu’elle attendait.
Le lendemain matin, les médecins, consternés, viennent dans sa chambre pour lui décrire la situation : ses ovaires ont été perforés par la violence du choc, et il est certain qu’elle ne pourra plus jamais avoir d’enfant. Plus qu’un monde, c’est toute une vie, sa vie, qui s’effondre. Et son avenir qui s’écroule.
Elle rêvait d’être mère, de fonder une grande famille, avec plein d’enfants. Elle en rêvait bien plus que d’être une vedette, ou de vivre une passion avec un homme, aussi séduisant fût-il.
‘‘Certaines femmes sont faites pour avoir des hommes, moi je suis faite pour avoir des enfants’’, aimait-elle dire. Désormais, elle devra se contenter d’avoir des hommes, ce qui n’est pas une gageure tant son charme et sa beauté sont fascinants. Sa vie va alors défiler trop vite, entre succès au cinéma et mariages avortés. En 1950, elle se fond dans le personnage de Caroline chérie, saga romanesque, entre aventures et romances sentimentales, qui fait d’elle l’actrice française la plus populaire.
Star en France, elle le devient un peu plus aux Etats-Unis, et en quelques années elle conquiert le monde. Elle partage l’affiche avec Gina Lollobrigida (Les Belles de nuit), Gary Cooper et Gregory Peck (Boum sur Paris), Charles Boyer (Nana). Le début des années 1950 est tonitruant pour la jeune femme blessée mais conquérante.
Après cinq ans de mariage, elle divorce de Steve Crane et épouse presque dans la continuité Christian-Jaque, son metteur en scène de Nana. Là encore, le mariage durera cinq ans. C’est en 1955 qu’elle tourne Lola Montes, de Max Ophüls, aux côtés de Peter Ustinov.
Le film est un chef-d’œuvre et elle y est exceptionnelle de talent dans le rôle d’une courtisane ruinée, convertie en bête de cirque pour survivre. Loin des personnages qui l’ont consacrée sex-symbol des années 1950, elle joue de sa beauté pour mieux porter le tragique de cette destinée. Le film n’aura aucun succès et certains diront même que Martine Carol ne se remettra jamais de cet échec. Faux. Elle a conquis ses lettres de noblesse avec Lola Montes et ça, personne ne pourra le lui enlever. D’ailleurs, les journalistes de cinéma la regardent désormais différemment. Elle les a époustouflés.

 Martine Carol

Sa carrière internationale se poursuit, pas toujours avec des choix heureux, mais avec quelques bons films dont elle partage l’affiche avec de grands comédiens. Shirley McLaine, Marlene Dietrich, Charles Coburn, David Niven, Fernandel pour Le Tour du monde en 80 jours. Van Johnson et Sean Connery pour Au bord du volcan. Tout de suite après avoir divorcé de Christian-Jaque, elle épouse, le 3 août 1959, le docteur André Rouveix. Cette fois, le mariage ne tiendra que trois ans. Au cinéma, elle se spécialise dans les films historiques : Madame du Barry, Austerlitz, Si Versailles m’était conté, de Sacha Guitry. Le 6 mai 1960, elle fête ses quarante ans, sans savoir qu’ils sonnent le glas de son époque dorée.
Une très jeune starlette a commencé de grignoter son territoire ces dernières années. Avant de lui exploser à la figure comme une bombe. Brigitte Bardot, devenue star des stars, ne laisse rien aux autres.
— Qu’est-ce qu’elle a de plus que vous, à votre avis ? demande-t-on à Martine Carol.
— Elle a surtout quinze ans de moins, répond-elle avec beaucoup d’humour, car il y a des moments dans la vie où il faut en avoir.
Sa quarantaine est un tournant. Tragique. Elle ne sera jamais mère. N’arrive pas à garder un homme. Sa jeunesse et sa beauté courent à leur perte, c’est en tout cas comme ça qu’elle le ressent.
 

Il lui reste sept ans à vivre.
Fidèle à une étrange habitude, elle épouse son quatrième mari, Mike Eland, quelques mois après avoir divorcé du troisième. Au cinéma, les rôles se sont raréfiés. On la voit dans Sur la plage, Le cave se rebiffe, avec Jean Gabin et Bernard Blier. Elle y est formidable là encore, dans un rôle assez ingrat. Il est étonnant de constater que les tabous de l’époque assimilaient une actrice de quarante-deux ans à une vieille chose, très désuète.
Reprise par la dépression, elle commence à s’engouffrer dans un cycle infernal: médicaments, somnifères, alcool. Tout concourt à sa chute. Longue et impitoyable. Après Le cave se rebiffe, elle ne trouve plus de rôle. Son talent n’est pas en cause. C’est son physique qui n’intéresse plus. En plus, on la sait malade, dépressive, à bout de souffle. Ses problèmes d’alcool ne sont plus un secret pour le Tout-Paris. Producteurs et réalisateurs ont tendance à baisser la tête et à changer de trottoir quand on prononce son nom. Elle le sait, et ça ne l’aide pas à aller mieux.
A partir de l’année 1963, elle souffre de problèmes cardiaques qui font qu’elle a de plus en plus mal à vaincre son accablement. Tout est effort pour elle. Elle sort de moins en moins, chaque pas est une épreuve. Mike Eland, son dernier mari, est d’une gentillesse touchante mais il ne peut vaincre ses désespérances.
C’est à cette époque qu’elle commence à parler d’en finir avec cette vie épuisante et sans joie.


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